Question : Nous essayons de mettre en place au sein de mon école vos enseignements concernant « le geste d’écriture » afin de réaliser une progression cohérente de la PS à la GS. Nous voudrions vous interroger sur la notion de progression et tout particulièrement de progression dans l’écriture du prénom. Par exemple, la majeure partie des enfants auront acquis la tenue de ligne et la régularité des espaces en fin de petite section mais trois ne les auront pas encore acquises. Il reste un point sur lequel nos avis divergent : l’écriture du prénom en MS. Certaines veulent attendre que les élèves sachent écrire les lettres de leur prénom.
Réponse : Il y a effectivement une progression de la petite à la grande section mais il faut comprendre cela comme une progression pour chaque enfant : la progression, c’est à dire la chronologie des étapes est la même pour tous dans chaque type d’apprentissage, mais le rythme de progression varie selon les enfants. Les enfants qui n’auront pas encore acquis la tenue de ligne et la régularité des espaces continueront donc cette acquisition en moyenne section en reprenant la préparation de l’étape où ils ont échoué.
En conséquence de ce qui vient d’être dit, l’écriture du prénom peut aussi bien commencer en PS mais il faut attendre que les enfants sachent écrire les lettres de leur prénom s’il s’agit d’écrire en cursive. Ce n’est pas la peine s’il s’agit d’écrire en capitales. Cette réponse étant considérée dans le cadre de la question, c’est-à-dire uniquement sous l’angle de la technique de dépôt de la trace écrite et en ayant fait les apprentissages préalables en amont.
En suivant ma méthode, pour être capable techniquement d’écrire des capitales il suffit d’avoir appris la tenue et le maniement du stylo et la gestion statique de l’espace graphique. L’étude des verticales, horizontales, obliques etc. souvent préconisée pour apprendre à écrire est donc inutile. Les capitales peuvent se regrouper par catégories sur les mêmes bases sans avoir à développer ces tracés au point où on le fait.
En effet, apprendre à les écrire consiste seulement à savoir y reconnaître les tracés obtenus par l’apprentissage de la tenue et du maniement du stylo et les réaliser dans les conditions apprises en gestion statique de l’espace graphique. Les prénoms en capitales peuvent donc être transcrits tôt par l’enfant, puisqu’il peut acquérir tôt les compétences techniques pour le faire. Toutefois, cela n’évite pas les nombreux dangers que représente l’écriture prématurée du prénom.
Pour écrire en cursives, il faut avoir appris les formes de bases et leurs dérivées *. Connaissant ces formes, on sait les reconnaître dans les lettres et, par voie de conséquence on sait écrire lesdites lettres. Cela permet donc d’écrire des lettres qu’on ne connaît pas encore (dans la mesure où, si on n’est pas encore arrivé aux lettres à œilleton b, r, s, v, w, f, vous leur montrez que pour passer d’une unité à l’autre on peut faire un œilleton, une tige ou simplement un angle, l’œilleton ou la tige n’étant pas une forme constitutive des lettres mais simplement une façon de négocier le passage d’une forme à l’autre).
Par ailleurs, ma recherche empirique et ma recherche universitaire m’ont montré que ces verticales, horizontales, obliques etc. ne sont pas des formes pertinentes de l’écriture cursive dans la mesure où elles ne s’organisent pas en catégories constitutives de ses lettres : on ne peut pas décrire une lettre cursive en nommant ainsi les formes qui la composent (En revanche, par exemple, vous pouvez dire que la lettre r est formée d’une attaque de grande boucle – comme un début de l – , un pont – comme la fin d’un n – et une attaque d’étrécie – comme un début de i – . Pour passer de l’attaque de grande boucle au pont on négocie le passage soit en faisant un œilleton, soit en faisant une tige, soit en faisant simplement un angle).
En conclusion,
– l’écriture du prénom en capitales peut être techniquement précoce. Personnellement je n’y suis pas favorable car l’écriture en capitales n’offre pas les mêmes possibilités que l’écriture cursive pour entrer progressivement dans l’écrit en percevant à la fois la relation graphophonologique et la nécessité de réfléchir pour savoir ce qu’on va écrire (et pas seulement comment on va l’écrire) ;
– l’écriture du prénom en cursive sera plus tardive car elle nécessite que l’enfant sachent en écrire chaque lettre soit pour l’avoir apprise soit pour y reconnaître (donc savoir écrire ) les formes de base et dérivées qu’il a apprises.
– l’enfant gagne toujours à avoir compris qu’écrire c’est produire du sens avant d’êre invité (ou au plus tôt au moment où il est invité) à écrire son prénom que ce soit en capitales ou en cursive.
Bonjour, j’utilise votre méthode depuis plusieurs années pour enseigner l’écriture cursive en GS et au CP. Par contre pour apprendre les lettres capitales à des MS/GS que pensez vous de l’approche de la méthode “le chien d’écriture” ou chien jeannot? La connaissez vous et qu’en pensez vous? Merci de votre réponse.
Oui, je connais la méthode du petit chien. Puisque les capitales peuvent s’écrire à partir de l’apprentissage de la tenue et du maniement du crayon, à mon avis l’artifice de cette méthode n’a pas lieu d’être. Apprendre à écrire, c’est apprendre à produire du sens en automatisant son geste. Avec l’apprentissage de la tenue et du maniement du crayon (cahier 1 maternelle chez Hatier) les fondements de l’écriture en capitales sont automatisés, leur accès est donc immédiat. Puisque rien ne fait écran pour y accéder pourquoi ajouter une complication ?
Bonjour,
J ai assisté il y a des années à une de vos conférences, je m appuie sur vos travaux pour mes progressions en classe de Gs. J’ai une question. Dans la salle des maîtres, une collègue nous a interpellé quant au fait que nous apprenons le prenom en cursive avec une lettre capitale en majuscule. Pour ma part, je trouve cela cohérent car nous apprenons aussi les codes de l écrit, un prenom commence par une majuscule car c’est un nom propre. Cela dit commencer par une minuscule fait travailler une lettre en cursive de plus. Je voulais savoir quel est votre point de vue sur le sujet? Espérant avoir été assez claire.
Cordialement.
Bonjour
Merci pour votre question.
La réponse est développée ici
La question du choix entre capitale, majuscules ou minuscules est traitée également en détail dans la dernière édition du geste d’écriture (2022)
3 informations ( que vous connaissez peut-être déjà ) :
– Le site vous offre une série d’une dizaine d’articles sur le processus de création des formes et le processus de formation des lettres intitulée Dix minutes par jour pour comprendre la formation des lettres.
Comment se créent les formes ? Comment se forment les lettres ?
– Il vous offre aussi une série d’exemples illustrés de fonctionnement de l’apprentissage du geste d’écriture en maternelle intitulée enseigner l’écriture en maternelle.
Faire accéder à l’écriture en maternelle en transversalité
– enfin, j’organise cet été à partir du 8 juillet un colloque qui peut vous intéresser, notamment ses 3 premiers jours
OBJECTIF : Compétences visées Comprendre comment par une juste compréhension du geste d’écriture l’enseignant peut s’appuyer sur les capacités de l’enfant pour le doter des savoir-faire nécessaires à une écriture de qualité et favorisant l’accès au sens dès les premiers écrits .
FINALITÉ : Être à même de mettre en œuvre cette compréhension dans sa classe pour obtenir étape après étape au rythme de l’enfant une écriture de qualité et qui fait sens.
: Présentation du colloque
ou
Thèmes des conférences :
Le geste d’écriture en maternelle – La prise en compte de l’enfant
Le geste d’écriture en élémentaire -Le regard de l’enfant sur les attentes
Cordialement
Danièle Dumont
Docteur en séance du langage