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L’organisation et le fonctionnement du système d’écriture cursive.

Le système d’écriture. C’est une expression qui parle à tout le monde. A y regarder de plus près on s’aperçoit que la plupart du temps on entend par là : le système alphabétique ou son équivalent en tant que signes qui permettront que l’écrit soit porteur de sens dans les langues non alphabétiques. Et bien souvent, ce n’est même pas de l’étude du système qu’il s’agit en ce qui concerne l’écriture alphabétique mais juste l’énoncé de la suite des lettres dans l’ordre l’alphabet ou classées par “familles de lettres”.  Mais ce n’est pas des lettres que je souhaite vous parler aujourd’hui, c’est du système dans lequel elles prennent vie. Les lettres, ce sera pour une autre fois.

Je viens donc de mettre en ligne la présentation du système d’écriture, c’est là sur youtube. 

Bon visionnage !

Par |2021-04-11T20:50:23+02:009 janvier 2017|0 commentaire

Une nouvelle comptine

Je reçois ce jour un double message fort intéressant.  Sa première partie propose une comptine.

Bonjour Madame Dumont.
J’ai assisté à une de vos conférences et acheté votre dernier livre. Merci pour ce travail qui éclaire ce qu’est notre écriture et comment l’enseigner.
Je voudrais apporter ma pierre à l’édifice. J’ai créé une comptine pour ramener au calme. Elle n’a pas d’air (ce n’est pas une chanson). Mais il faut marquer les syllabes régulièrement, avec la voix, avec les mains ou les pieds pour obtenir une pulsation.
La voici :

Je sais parler tout bas
zoum et zoum et raplapla
Je sais bien chuchoter
zoum et zoum et tasse de thé
Je sais surtout me taire
zoum et zoum et pomme de terre.

On peut l’associer à des gestes si on ne tape pas dans les mains : mains à plat l’une contre l’autre pour le raplapla, faire semblant de se servir du thé pour le deuxième vers et mettre un doigt devant la bouche pour la fin.
On peut dire cette comptine (le terme est ici approprié puisqu’elle permet de compter le temps en durées égales) lentement ou rapidement : on fait ainsi varier le tempo.
Elle est de plus efficace pour ramener le calme, recentrer les élèves.
Elle est de ma part un hommage à Louis Prima (zoum et zoum).

Cordialement,

Stéphane Lebrun (instit de maternelle MS)

Je trouve votre petite comptine tout à fait ravissante. C’est un bon étayage du rythme d’espace qui sert à apprendre à tenir la ligne et à gérer l’espace sur l’horizontale. Je proposerais la gestuelle suivante :

Je sais parler tout bas  on met les mains en porte-voix
zoum et zoum et raplapla on frappe dans les mains
Je sais bien chuchoter on met les mains en porte-voix
zoum et zoum et tasse de thé  on frappe dans les mains
Je sais surtout me taire on met un doigt devant la boucle
zoum et zoum et pomme de terre. on fait semblant de frapper dans les mains

Elle me semble effectivement particulièrement propice à ramener le calme et à recentrer l’attention.

En ce qui concerne son usage en étayage de la gestion statique de l’espace graphique, on pratique ensuite comme il est indiqué pour l’ensemble des comptines : frappes sur la table, frappes sur la table en avançant vers la droite, taches de peinture à l’éponge.

Merci Stéphane pour ce partage

 

Par |2019-02-22T22:50:47+01:0012 novembre 2016|2 Commentaires

Comment commencer avec les 3 ans ?

Une enseignante m’écrit :  Nous allons travailler lors de la prochaine période sur les activités artistiques et les graphismes,  que me conseillez vous pour débuter avec les 3 ans ? 
Voici donc ma réponse :

Un mot rapide sur les graphismes. Tels que je les comprends à travers tout ce qui s’en dit, se pratique et se conseille, le graphisme (fiches de graphisme) ne sert à rien d’autre qu’à faire croire à l’enseignant qu’il commence par là à apprendre à écrire à l’enfant. En ce sens, il est inutile, car sans lien avec l’écriture, sans aucun intérêt et propre à faire repoussoir ou à induire en erreur  l’enfant qui cherchera ensuite à les appliquer pour écrire, ce qui sera contreproductif. Je ne développe pas plus ici.

Les activités artistiques et les graphismes étant associés dans la question, je réponds uniquement sur ce qui, dans les activités artistiques participe de la préparation à ‘écriture.

Que faire pour débuter ?

Plutôt que de faire un long article amplement détaillé je synthétise et renvoie à la lecture du livre Le geste d’écriture Méthode d’apprentissage – Cycle 1, cycle 2 – Différenciation et transversalité (édition 2016). La synthèse se présente dans l’ordre des exercices mais la lecture est à faire dans l’ordre des chapitres pour mieux comprendre  et voir l’impact de la transversalité. Car nous sommes bien là dans la transversalité.

Donc, pour commencer, je propose, de façon récurrente c’est à dire pas une fois isolée mais aussi souvent que possible, de :
–  faire froisser du papier à coller ou à suspendre dans le cadre d’un exercice d’art plastique (cela tonifie la main) (cf. Pages 243 et suivantes)
– commencer un jeu de bouchons (il ressemble au jeu de billes) (cf. page 244/245) ( cela mobilise le jeu du majeur pour manier correctement le crayon plus tard ). Réinvestir en art plastique pour laisser la trace du déplacement du bouchon (cela mobilise l’épaule et commence à habituer à une bonne tenue de ligne)
– introduire le cartable magique (pages 210 et 211 surtout ne pas oublier de lire la 210 pour mettre en application la 211) (cela permet de repérer la droite et d’initier de mouvement gauche droite autant pour les gauchers que pour les droitiers). On extrait du cartable des  outils qui seront utilisés en activité artistique.
– commencer le relais de hockey (tranquillement sans enjeu) (bien lire comment il se pratique) pour initier le lieu d’attaque et le sens de déroulement de l’écriture (renforcement de l’exercice mentionné ci-dessus, mais pas seulement). Il prépare au jeu de foulards qui pourront ensuite donner lieu à des chorégraphies (et qui sont une étape pour fluidifier le mouvement).
– mettre en place une activité de gestion statique de l’espace graphique dans le cadre d’exercices d’arts plastiques.
– faire des fonds de peinture à utiliser plus tard (exercice de mobilité et souplesse de l’épaule dont le produit est utilisé en arts plastiques.

Tout cela, c’est “pour commencer”, tranquillement, sans précipitation.

Les activités crayon/papier viendront lorsque les enfants sauront tenir le crayon, il s’agira, pour commencer, d’apprendre à placer la main.

Je pense beaucoup de bien des gribouillis fais avec différents outils (éponges ou autres  puis plus tard avec un crayon quand l’enfant saura le tenir et commencera à apprendre à placer sa main)

En attendant que les enfants sachent tenir un crayon, des collages de toutes sortes, des productions à l’éponge, à la fourchette … constituent des activités d’art plastique qui peuvent dans bien des cas, participer de l’apprentissage de l’écriture.

Quant aux formes elles-mêmes on peut pratiquement faire ce qu’on veut à la condition de bien cerner son objectif mais il vaut mieux éviter les boucles à l’envers et les ronds (à l’endroit ou à l’envers) tant qu’ils n’ont pas été appris en préparation à l’écriture. Voir la vidéo Eduscol dont il est question ici.

Par |2020-03-23T10:54:59+01:004 octobre 2016|2 Commentaires

Une vidéo Éduscol du processus de création des formes et du processus de formation des lettres

Publiée depuis 2002 dans Le geste d’écriture et les cahiers correspondants,  la modélisation de l’apprentissage de l’écriture en donne pour finalité l’obtention d'”une écriture cursive fluide, claire, lisible, bien disposée dans la page et dans le lignage, autorisant directement l’accès à la fonction sémantique de l’écriture”  (Le geste d’écriture – Méthode d’apprentissage – Cycle 1 – Cycle 2 Éditions Hatier, collection Hatier pédagogie 2003 et rééditions suivantes  page 14,  Le geste d’écriture – Méthode d’apprentissage – Cycle 1 – Cycle 2 – Différenciation et transversalité  Éditions Hatier 2016, collection Enseigner à l’école primaire.) Cf. tableau.

Cette finalité, réaffirmée par Éduscol, n’est pleinement atteinte que si la gestion dynamique de l’espace graphique est réalisée efficacement c’est à dire si les formes sont acquises et aménagées constamment au fil de l’écrit en fonction de leur environnement (exemple le r ne débute pas de la même façon s’il suit un o que s’il suit un e).

Les formes constitutives des lettres sont donc créées et mises en œuvre par le mouvement en même temps qu’il les dépose sur le support pour former les lettres en les aménageant pour une meilleure efficacité, ce qui donne de la fluidité à l’écriture.  Je vous les présente en vidéo sur Éduscol

Une fois passées le CP, l’enfant complète son apprentissage avec l’étude des majuscules et doit conserver la qualité de son écriture ou l’améliorer si nécessaire. Vous trouverez chez Nathan un petit ouvrage, Une bonne écriture, choix ou nécessité, qui vise à poser toutes les questions qu’on peut poser sur l’écriture en élémentaire et qui propose de nombreux exercices pour les CE2, CM1, CM2.

Pour terminer cet article, un petit rappel d’un article ancien sur le repérage des anomalies graphiques les plus récurrentes signalé également par Éduscol. Il donne quelques informations sur ce qui peut être pratiqué en classe pour des anomalies simples de l’écriture. Sa lecture ne saurait se substituer à une formation à la rééducation de l’écriture.

Par |2020-03-29T16:09:15+02:001 octobre 2016|3 Commentaires

Croquet ou hockey ? Que choisir et comment faire à la maison ?

Apprendre à écrire est une action complexe. On croit trop souvent que cela consiste à apprendre à reproduire la forme des lettres. Est-ce parce qu’on confond trop souvent graphisme et écriture ? Quoi qu’il en soit, il faut bien les apprendre aussi les formes : l’écriture est formée de lettres, les lettres sont formées de formes et les formes sont formées par un mouvement, en fait par deux mouvements un qui passe par en bas, un qui passe par en haut. Quand on regarde une écriture manuscrite on voit une succession de contacts courbes des lettres sur la ligne et le tracé s’aménage au-dessus de ces contacts, c’est ainsi que se forment les boucles, les étrécies, les ronds… Le mouvement qui met en œuvre l’écriture ne se fait que de deux façons : celle que je viens de décrire : c’est la 1ère unité  de mouvement, l’autre – qui prend contact avec le haut de l’interligne pour aller vers la droite – c’est la 2ème unité.  La 1ère unité est présente dans toutes les lettres. Elle est donc très importante. Comment commencer à l’enseigner aux enfants tranquillement, en leur donnant envie de participer ?

La nouvelle édition du Geste d’écriture (édition 2016) l’explique et l’illustre. Elle abandonne l’idée du jeu de croquet pour celle du jeu de hockey. Lubie de chercheur ou raisons concrètes ? Je m’en explique dans Le geste d’écriture et en deux mots ci-dessous.

Une maman m’a interpellée à ce sujet tout en me demandant des précisions. Je réponds aux nombreux commentaires faits sur le site directement sous le commentaire  et aux nombreuses questions posées par mail directement par mail. Il arrive parfois cependant que je le fasse sous forme d’article. C’est donc le cas aujourd’hui pour la question posée par cette maman, elle m’écrit :

Je suis en train de (re)lire votre livre « le geste d’écriture » (édition 2006), et je ne comprends pas bien le jeu de croquet que je souhaiterais faire avec mon fils (je préfère le croquet au hockey, car je possède déjà un jeu de croquet et je ne veux pas investir dans un jeu supplémentaire)
Voici mes questions :
– le parcours du point de départ au point d’arrivée est-il droit ou courbe ?
– faut-il aller du point d’attaque au point d’arrivée en un seul coup ?
– Quelle distance prévoir entre le point d’attaque et le point d’arrivée ?
– Combien d’arceaux prévoir entre le point d’attaque et le point d’arrivée ?
Pardon pour toutes ces questions, mais j’essaye de bien faire ! Et merci pour vos ouvrages « maternelles » auquel mon fils (MS) prend de plus en plus de plaisir. Après un départ un peu bougon, il est devenu un pro de « la course aux zigzags !

Avant de répondre, je salue la bonne volonté de cette maman et son immense désir de bien faire pour que cet apprentissage se passe bien pour son enfant. L’école maternelle n’étant pas obligatoire, certains enfants reçoivent uniquement de leurs parents l’ensemble des apprentissages premiers. Je tiens toutefois à dire que, sauf dans ce cas et sauf cas spécifique, il me semble souhaitable de laisser aux enseignants le soin d’apprendre aux enfants ce qui relève du domaine de l’école.

Voici ma réponse :

Par ses explications et ses illustrations, la nouvelle édition du geste d’écriture répond à l’ensemble de vos questions. Cette édition, 2016 donc, prend acte des recherches que j’ai menées entre temps (et ajoute différenciation et transversalité, projet en attente depuis 6 ans). Vous verrez des éléments de réponse à vos questionnements ici sur le site : http://legestedecriture.fr/avant-den-arriver-aux-boucles-sur-papier-histoire-dun-pari/ puis en suivant les liens. Vous pouvez également lire cela : http://legestedecriture.fr/des-groupes-petits-ou-inegaux-dans-le-relai-de-hockey/

Pour vous répondre directement, je vous rassure : vous n’avez pas de jeu de hockey, mais vous avez un jeu de croquet ? Pas de problème, votre enfant utilisera le maillet pour pousser le palet. Vous n’avez pas de palet ? Ce qui importe, c’est que vous ayez un objet rectangulaire pas trop haut à faire glisser au sol en le poussant avec le maillet, c’est plus facile à gérer qu’une balle qui roule (d’où le changement entre croquet et hockey). Une boite d’allumettes vide fera l’affaire.

 – Le parcours du point de départ au point d’arrivée est-il droit ou courbe ? L’objectif est d’encoder le mouvement : le mieux est qu’il soit toujours à l’identique, donc le parcours est tout droit.

– Combien d’arceaux prévoir entre le point d’attaque et le point d’arrivée ? Le jeu de croquet étant transformé en jeu de hockey, il n’y a plus d’arceau.

– Faut-il aller du point d’attaque au point d’arrivée en un seul coup ? Non sinon il n’y a pas la répétitivité nécessaire à l’encodage.

– Quelle distance prévoir entre le point d’attaque et le point d’arrivée ? L’enfant pousse par petits coups. La distance est la longueur de votre couloir, de sa chambre, de votre séjour, bref du lieu où vous installez le jeu. Pour que le geste soit bien encodé l’enfant va pousser entre 6 et 10 fois le long du trajet voire plus. Vous le chronométrez. Vous convenez d’un nombre de fois et vous notez les progrès. Ce qui importe, ce n’est pas qu’il se précipite, c’est qu’il le fasse bien mais d’un geste spontané. Des vidéos sur internet m’ayant fait découvrir comment peuvent être transformés par incompréhension mes actes de remédiation, puisqu’il s’agit ici d’une remédiation je vous conseille vraiment de démarrer avec l’aide d’une des rééducatrices ou un des rééducateurs de la liste http://legestedecriture.fr/a-votre-service/ . D’autres adresses arriveront en fin d’année.

Les enseignements, pour leur part, trouveront dans Le geste d’écriture 2016, toutes les informations, descriptions et illustrations dont ils peuvent avoir besoin pour saisir tous les tenants et les aboutissants de cette activité (et ils me savent toujours disponible pour leur répondre en cas de besoin complémentaire).

Bravo pour votre valorisation de la course aux zigzags aux yeux de vote fils. Assurez-vous qu’il la fasse bien d’un mouvement des doigts et non d’un mouvement du bras ou du poignet, que son poignet soit bien en contact avec la table, que son avant-bras ne tourne pas autour de son coude et, bien sûr, avant toute chose, que ses doigts soient bien placés sur le crayon.

Les rééducateurs et rééducatrices Méthode Dumont, listés sur le site sont formés pour veiller à tout cela et permettre aux enfants, adolescents ou adultes  d’acquérir une écriture efficace et fluide en remédiant à leurs difficultés.

Nous sommes là, bien sûr, très loin du graphisme… Il s’agit de prendre en compte les spécificités de l’écriture sans introduire de paramètres toxiques.

Par |2020-03-23T10:56:55+01:0017 septembre 2016|1 Commentaire

Les familles de lettres

Parmi les caractéristiques de l’écriture, la forme des lettres est celle qui retient le plus l’attention. C’est logique puisse c’est elle qui porte le code qui donne accès à la lecture.

Considérer que chaque lettre a une forme renvoie directement à l’alphabet et semble être pratique puisse c’est LA classification de la suite des lettres. Si je dis : je reconnais que chaque lettre a une forme, puis-je dire pour autant : je reconnais une forme par lettre ? Cela signifierait que chaque lettre est formée d’une seule et même forme et que cette forme est unique, c’est-à-dire qu’elle ne concerne que cette lettre. Or, si je compare les lettres cursives p et h je vois bien qu’il y a entre ces lettres des formes communes. Ce rapprochement me dit aussi qu’au moins certaines lettres ne comportent pas qu’une seule et unique forme.

Du coup cela exclut que je puisse construire la classification de l’écriture des lettres sur la notion de familles de lettres : pour séduisante qu’elle soit cette notion n’est pas adaptée à une juste compréhension de la structure des lettres, classer e, l dans la famille des boucles, i, u et t dans celle des étrécies ne pose pas de problème puisque le corps de chacune de ces lettres n’est formé que d’une seule et unique forme : la boucle pour e et l, l’étrécie pour i, u et t, mais ensuite comment classer h et k ? Comment classer r, s, mais aussi a ou d ? Est-ce que dire qu’elles appartiennent à deux ou à trois familles de lettres permet de comprendre leur formation. Si je dis que la lettre h est de la famille de la boucle et de la famille du pont, cela suffit-il à rendre compte de sa forme ? Que fait-on de l’arrivée de la boucle du h droit sur la ligne ? Autrement dit, comment le recodage du h à l’approche de la ligne s’inscrit-il dans cette classification ?

Lorsque je me suis mise à la recherche des « formes de base de l’écriture », j’ai considéré toute forme récurrente dans les lettres comme étant une « forme de base » mais il restait encore à faire. D’où la suite de ma recherche dont ma thèse de doctorat sur le système d’écriture des minuscules cursives latines en usage dans les écoles françaises.

Passer de l’idée de formes de base à celle de familles de lettres était alléchant. Je n’ai pas franchi ce pas car il ne rend pas compte de l’origine procédurale de la trace écrite. A l’inverse, j’ai gardé le cap sur la notion de mouvement en dégageant la forme que l’on rencontre dans  i, u et t de la référence au dessin d’une forme proposée par le mot coupe : à peine le ministère venait-il d’adopter ma terminologie que j’ai remplacé coupe par étrécie qui rend compte de la nature procédurale de la forme ainsi désignée (on obtient une étrécie en étrécissant la boucle, ce que je disais déjà en la nommant coupe dans la publication de 1999, cf. Le geste d’écriture, page 86).

Cette démarche m’a ouvert l’accès à la compréhension du système d’écriture en attirant mon attention sur les relations qui existent entre les formes :

– des relations hiérarchiques : par exemple l’étrécie est une dérivée de la boucle,

– des relations fonctionnelles : par exemple la lettre a est formée d’un rond fermé par une petite étrécie.

Outre qu’elles permettent de comprendre comment est structurée et comment fonctionne l’écriture, mes conclusions recoupent le fait que la progression la plus logique et la plus efficace d’apprentissage des lettres cursives manuscrites à l’école maternelle est pour commencer : e, l, i, u, t, c, o, a, d.

Ce pas que je réfute pour passer de l’idée de progression à celle de familles de lettres, d’autres l’ont franchi et on m’en a attribué la paternité. En effet, l’idée collait bien aux apparences : à partir du moment où je disais les lettres cursives sont composées de boucles, de coupes (étrécies), de ronds etc. il a été jugé bon de transformer mes propositions en les lettres cursives se répartissent en familles de boucles, de coupes etc. Il s’agit là d’un contresens : la notion de familles de lettres évacue l’idée de mouvement qui est pourtant à la base de ma méthode : l’écriture manuscrite est le produit d’un geste qui gère l’espace pour créer et déposer sur un support etc.

On trouve en abondance sur la toile des articles qui présentent « les familles de lettres selon la méthode Dumont ». Je tiens à insister sur le fait qu’il s’agit d’un contresens et d’un détournement de mes propositions pédagogiques : la notion de familles de lettres ne permet pas d’intégrer le mouvement, elle fige les formes constitutives des lettres dans un statut de formes immobiles alors qu’il s’agit de matérialisations de processus. C’est le processus de création des formes qu’il faut considérer (Comment passe-t-on de la boucle à l’étrécie et de la boucle au rond ? Comment passe-t-on du rouleau au pont et du rouleau au jambage ?) et, à partir de là, c’est le processus de formation des lettres qu’il faut considérer, par exemple : quelle relation fonctionnelle fait que le rond et l’étrécie donnent la lettre a ? La question en elle-même montre qu’il s’agit bien d’y voir un processus et non une forme figée : rond + étrécie ne donnent rien, en revanche un rond fermé par une petite étrécie donne la lettre a.

C’est parce que son cerveau a enregistré qu’il s’agit d’un processus et le met en œuvre que le scripteur recode dans une progression imperceptible la fin du rond pour fermer le a par une étrécie. C’est parce que son cerveau a enregistré qu’il s’agit d’un processus et le met en œuvre que le scripteur adapte le 1er pont du n dans le mot on au lieu de le faire identique au n du mot en. Au cours de l’acte d’écriture, le cerveau transforme instinctivement le discret (c’est-à-dire ce qui est figé dans une désignation unique et dénombrable : 2 formes de base que je peux nommer et 5 dérivées que je peux nommer également et auxquelles je peux attribuer sur le papier une forme dont je peux montrer le début et la fin) en continu (c’est-à-dire ce continuum qui passe progressivement d’une forme à l’autre sans qu’on puisse désigner une démarcation figée).

Cette gymnastique du cerveau pour passer du discret au continu est unique et favorise tous les apprentissages car elle suscite des aménagements personnels et constants qui échappent à l’attention pour que chaque unité de forme puisse se recoder pour donner accès à l’unité de lettre et pour que chaque lettre puisse se recoder si nécessaire pour s’intégrer au mot, ce qui donne à l’écriture sa fluidité :

– lorsqu’il se ferme dans la lettre a, le rond n’est plus tout à fait le rond puisqu’il a laissé place à l’étrécie ;

– lorsque le plein du h arrive sur la ligne, ce qui était au départ une boucle n’en est plus une puisqu’elle vient imperceptiblement de se transformer en pont ;

Il suffit de gommer la partie bouclée du h pour voir à quel point il s’apparente au n précédé d’un o.

Qu’elle concerne le passage de l’unité forme à l’unité lettre ou le passage de l’unité lettre à l’unité mot (exemple des mots en et on cité plus haut) cette gymnastique ne peut être que bénéfique au fonctionnement du cerveau : elle intègre et respecte les acquis tout en laissant au scripteur une marge de liberté.

On comprend pourquoi l’enfant gagne à apprendre à écrire par une démarche procédurale au lieu de reproduire des formes figées et immuables. On lui montrera le processus de création des formes puis, à partir de là, le processus de formation des lettres, il en tracera quelques-unes à la suite pour voir s’il a bien compris et s’il sait faire et très vite on lui demandera de produire du sens, seule raison d’être de l’écriture.

Donc,

  • oui, la progression à privilégier surtout en début d’école maternelle est celle qui suit le processus de formation des lettres (e, l, i, u, t, c, o, a, d au début pour l’école maternelle ; ce qui ne veut pas dire que la suite ne doive pas suivre ce processus)
  • non la référence à des familles de lettres ne fait pas partie de ma méthode et je ne la cautionne pas car (entre autres) elle renvoie à l’idée de dessins de lettres, donc ignore la nature procédurale de l’écriture.
  • non, on ne peut pas assimiler progression dans l’apprentissage de l’écriture et familles de lettres.
  • non l’apprentissage de l’écriture cursive n’a rien à voir avec le graphisme. Le graphisme ne rend compte ni des formes constitutives des lettres, ni de la nature procédurale de l’acte d’écriture, ni, par voie de conséquence, du lien imposé par l’acte d’écriture entre trace et sens au fil du déroulement de la trace.

Quelques mots de la relation entre forme et mouvement dans les publications de Robert Heiss.

Ce psychologue cognitiviste expose que l’écriture fonctionne sur la base de trois « rythmes » le rythme de mouvement, le rythme d’espace et le rythme de forme. Pour autant ses théories ne disent rien de la forme des lettres en elles-mêmes, elles en considèrent uniquement l’état : la forme est ou non structurée, elle est ou non personnalisée, elle s’adapte ou non à son environnement, avec tous les degrés de variation entre les extrêmes énoncés. Il confère au mouvement le rôle de porter l’écriture. La relation entre forme et mouvement intervient pour Heiss dans ce qu’il nomme le rythme de mouvement proprement dit et le rythme de forme proprement dits : c’est-à-dire la façon dont le mouvement module la forme ou la façon dont la forme est portée par le mouvement. Ce « rythme proprement dit » intègre sans le nommer le recodage nécessaire à une écriture fluide.

Par |2020-03-23T10:57:38+01:0027 août 2016|2 Commentaires

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